« Que le football est devenu parfait. Désormais, avec la VAR, plus de but injustement refusé ou accordé, plus de contestations possibles et surtout fini les polémiques après le match ». Ça, c’était l’idéal voulu lors de l’instauration de l’arbitrage vidéo.
Mais la réalité est toute autre. Venue épurer le football, la VAR n’a pas été la solution contre les polémiques. Pire, ce justicier est devenu la cible des supporters, des amateurs de football, des conservateurs, des amoureux de la bonne vielle époque pour résumer. Désormais, en Allemagne, à chaque visionnage de l’arbitrage vidéo, les supporters en profitent pour demander sa suppression. Un constat difficile, qui nous pousse à nous demander s’il faudrait supprimer purement et simplement la VAR ? Face à cette question, deux journalistes d’AfriqueSpors, à savoir Birane Niang Bassoum et Kofi Atiso, donnent leur avis et arguments dans le Débat de semaine.
Birane Niang Bassoum : permettez-moi d’emprunter les propos de Michel Platini : « la VAR est une belle merde »
Le football moderne se conjugue avec la VAR et ses polémiques qui pullulent à longueur de journée. Instaurée pour gommer les erreurs manifestes, la VAR a apporté son lot de nouveaux problèmes. D’aucuns trouvent l’arbitrage vidéo moderne voire une forme de restitution d’une certaine justice au football. D’autres trouvent cela consternant, à la limite chiant. Personnellement, je me range du côté de la deuxième catégorie.
« Le football c’est la spontanéité, ce sont les émotions »
D’abord, pour la plus apparente des raisons, la « perfection » a pris le pas sur l’émotion. Le football c’est la spontanéité, ce sont les émotions mais aussi le vice qui les entoure. Que l’on se dise la vérité, nous ne sommes dans une école d’aristocrates, nous sommes dans un rectangle vert pour éblouir et émerveiller. C’est tellement chiant ces changements d’émotions brusques. De devoir passer près de de la joie d’un but libérateur aux affres d’une élimination en quart de finale de ligue des champions, c’est affligeant. Je revois encore la célébration de Sterling, les longues enjambées de Guardiola, tout ça pour finir aux mines tristes et abattues des supporters mancuniens présents ce jour-là dans les travées de l’Etihad Stadium. La fameuse VAR venait de jouer avec nos cœurs à tous.
[totalpoll id= »794558″]Les émotions ne sauraient être sujettes à une quelconque validation aussi parfaite soit-elle. Ou du moins, ce n’est pas le football avec lequel j’ai grandi.
Aussi, le football a toujours été marqué par une forme d’escroquerie et de tricherie (dans le bon sens du terme). Ça c’était le beau jeu dans sa forme la plus simple, pure si j’ose dire. A l’instar de la « main de Dieu » de Maradona ou celle de Thierry Henry contre l’Eire ou encore le but de Messi contre l’Espanyol imitant son illustre compatriote, des actions litigieuses ont longtemps fait l’histoire de ce sport que nous apprécions tant. Faudrait-il remettre en question tout ça alors que c’est l’essence même du jeu. Certainement pas !
« La VAR n’appelle qu’à d’autres décisions plus discutables »
Ensuite, force est de constater que plusieurs acteurs ne maîtrisent pas un tant soit peu l’outil. En clair, la VAR n’appelle qu’à d’autres décisions plus discutables. L’on se rappelle de la finale de la Ligue des Champions africaine et son immense tollé à cause du dysfonctionnement de la VAR ou même la récente demi-finale aller de la Coupe d’Italie opposant la Juventus au Milan, les exemples sont légion. Sans cet outil dont on nous chante tant les mérites ou du moins son manque de maîtrise, aurait-on eu droit à tout ce tohu-bohu à en plus finir ?
Encore plus rageant avec la VAR, le rythme du jeu est cassé, on regarde l’action – les téléspectateurs et les supporters sont laissés dans l’ignorance – on rembobine, rien n’est expliqué. On expulse, on modifie une décision. Bref, on s’ennuie surtout. En sus, une étude menée en Serie A montre que les décisions prises avec les images présentent toujours un pourcentage d’erreur élevé, de l’ordre de 20% rien qu’en Italie. C’est dire !
Enfin, même les dirigeants des instances ne se donnent plus de mal à défendre la VAR. A l’image du président de l’UEFA qui a clamé haut et fort les limites de l’arbitrage vidéo sans oublier Wenger qui appelle à en modifier les contours, le monde du football s’en lasse. Et c’est loin d’être flatteur. Sous couvert de rendre le football plus équitable et juste, la VAR a surtout supprimé la dimension humaine qui faisait tant la beauté du jeu. Pour finir, j’ai beau ne pas être d’accord avec le personnage ni les prises de position de Michel Platini, permettez-moi cependant de lui emprunter ses propos : « la VAR est une belle merde ».
Kofi Atiso : « Je soutiens parfaitement l’utilisation de la VAR »
La VAR, un outil mis en place pour réduire l’injustice dans le football. Avant de donner mes arguments, je vais faire une petite rétrospective. La main de Diego Maradona est restée dans l’histoire mais elle a pénalisé l’Angleterre lors de la Coupe du Monde 1990. Franck Lampard avait réduit le score pour l’Angleterre face à l’Allemagne au mondial 2010. Un but clair refusé par l’arbitre et après les Allemands ont déroulé. Des exemples sont légions mais je vais m’attarder à ces deux exemples.
Je soutiens parfaitement l’utilisation de la VAR même si à une certaine période on a l’impression que le football perd de son essence ou de sa verve. Tout début de révolution n’est jamais aisé et avec le temps nous allons atteindre la perfection qui dans l’entendement humain n’est pas de ce monde.
La VAR a résolu plusieurs problèmes dans le football. Et à 90%, les équipes méritantes gagnent des matchs. Avec la VAR, plus de buts fantômes, plus de buts inscrit de façon litigieuse, plus de regrets et plus d’images fortes qui taraudent à jamais les esprits de ceux qui en sont victimes.
Plus haut, j’avais donné quelques illustrations. S’il y avait la VAR à l’époque, on aurait pu voir une tournure de la rencontre entre l’Angleterre et l’Allemagne en 2010 et également la main restée célèbre de Maradona ne le sera jamais. Puisque ce but ne sera jamais validé.
« La VAR est très jeune et les couacs sont permis »
DE plus, je ne suis en aucun cas pour l’injustice. Et s’il existe une quelconque façon de combattre l’injustice, il faut la saisr. Je suis d’accord qu’elle doit être modifiée, perfectionnée, mais la VAR est aujourd’hui indispensable pour l’équité dans le football.
Pour chuter, je dirais que le football ne devra pas rester en marge de ce qui se fait de façon mondiale. On a des bibles numériques, des cours qui sont suivis en ligne, bref la technologie est devenue notre quotidien. Et ce n’est pas le sport roi qui va rester en aparté. Au moment où cet outil sera assimilé par tous les arbitres et vulgarisé à travers le monde, on verra véritablement son apport dans le football moderne qui est devenue plus rythmé, rapide comme avant. Et l’humain n’aura plus cette capacité de suivre ce rythme infernal. Notons que la VAR est très jeune et les couacs sont permis.
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