Retraité depuis 2022, Aurélien Chedjou (37ans, 49 sélections avec le Cameroun) s’est livré en exclusivité pour Afrique Sports. L’ancien défenseur Camerounais a parlé de sa reconversion intelligente, avant de retracer son parcours. Le Lion Indomptable a aussi évoqué ce qu’a vécu son ami, Eden Hazard au Real Madrid et avoue qu’il aurait adoré jouer avec Zinedine Zidane, son idole. S’il se dit capable de payer 100 millions juste pour voir Lionel Messi jouer, Aurélien Chedjou a parlé sans filtre. Lisez plutôt !
Afrique Sports : Bonjour ! Vous êtes Aurélien Bayard Chedjou Fongang, ancien international Camerounais, on ne vous présente plus d’ailleurs. A 37ans et après le départ du club Turc, Adana Demirspor, vous avez décidé de prendre votre retraite à l’été 2021. Que fait aujourd’hui Aurelien Chedjou ? Une reconversion en vue ? Parlez-nous-en !
Aurelien Chedjou : J’ai décidé d’arrêter parce que je sentais que j’avais tout donné. Et puis, ma famille me manquait, mes enfants me manquaient. J’ai senti le besoin. Qu’est-ce que je fais aujourd’hui ? Je suis au Cameroun, je m’occupe de ma famille, j’ai monté ma boite de CSC (Chedjou Sports Consulting). On fait du consulting pour les joueurs que ça soit au niveau local ou au niveau professionnel. Et on essaie de brancher les joueurs avec les clubs en Europe. Pour ça, j’ai invité des clubs au Cameroun en mai pour un tournoi où il y avait des scouts qui sont venus pour voir ce qui se faisait au Cameroun. Là, je vais en Côte d’Ivoire en septembre, invité par une autre académie aussi. Voilà, on bouge pas mal. Je fais aussi le MIP le Master pour les Joueurs Internationaux avec l’UEFA qui prend fin en 2023. Je suis pas mal occupé.
Formé à Villarreal, c’est en France vous êtes passé Pro. Comment avez-vous été repéré par le sous-marin jaune ? Et pourquoi vous n’aviez pas pu y débuter la carrière pro ?
J’ai commencé en pro en France. Mais, peu le savent j’ai commencé à Villarreal. Le début des années 2000, je suis arrivé à Villarreal. Je ne suis pas passé pro parce que tout simplement à l’époque les jeunes étrangers ne peuvent pas jouer en équipe B. On m’a aussi dit que ça allait être bouché parce qu’il y avait des Espagnols. J’ai dû, avec mon agent de l’époque, trouver un challenge à Pau qui était en National. C’est comme ça je me suis retrouvé en France. J’ai pas mal bourlingué que ce soit Pau, Auxerre, Rouen. J’ai même fait des tests à Louhans Cuiseaux qui n’ont été concluants, à Dijon pareil. Et je me suis retrouvé à Lille après où tout a été concluant. Et c’est comme ça je me suis retrouvé pro à Lille. C’est ce qui a fait que je suis passé Pro en France et non en Espagne.
Villarreal était un petit club de deuxième division. Il cherchait à monter en première division. Il cherchait à être reconnu sur le plan international. Du coup, ils ont envoyé des émissaires en Afrique et en Amérique du Sud. Quand nous sommes arrivés, il y avait trois autres Brésiliens. La chance pour nous, c’est ce que ces émissaires sont venus au Cameroun. J’étais à la Kadji Sports Academy. Et c’est comme ça qu’au bout de trois, quatre jours de tests j’ai été repéré avec deux compagnons à moi et nous nous sommes envolés en Espagne.
Lille, c’est le club où Chedjou s’est révélé. Que retenez-vous de votre passage dans le Nord de la France ?
Au-delà des titres que j’ai remportés avec Lille, je retiens surtout que c’est un club qui m’a fait être un homme, qui m’a donné beaucoup de responsabilités, qui m’a donné aussi beaucoup de confiance, qui m’a fait passer du jeune gamin que j’étais à l’homme que je suis aujourd’hui. Tout a commencé à Lille. Ça va même au-delà du football.
«Ce club restera à jamais gravé dans mon cœur»
Quel que soit les dirigeants qui passeraient, je supporterai toujours Lille. D’ailleurs pour la petite histoire, c’est là où je fais mon stage (MIP). Jean-Michel Vandamme, le directeur du centre de formation m’a ouvert les portes pour apprendre à ses côtés, pour voir comment le club fonctionne que ce soit au niveau des jeunes ou chez les Pros. C’est pour vous dire quelle place ce club occupe dans mon cœur. Et c’est vraiment un club familial, c’est ce qui m’a le plus marqué.
Au Losc, vous avez côtoyé notamment Eden Hazard. A cette époque, saviez-vous déjà que le Belge allait devenir l’un des meilleur au monde à Chelsea ? Parlez-nous un peu du Diable Rouge.
Eden, oui à l’époque on savait déjà qu’il sera le joueur qu’il est devenu. Nul n’aurait été les blessures qu’il a eues avec Madrid, je pense qu’on verrait le vrai Eden parce que pour moi les blessures l’ont empêché d’être le joueur que nous tous voulons voir.
Personnellement, je savais qu’il allait être comme ça. Je me rappelle comme si c’était hier. On jouait face à Nancy et on était mené 2-0, Eden est rentré à 16 ans et demi ou 17 ans, on a perdu 3-1 mais j’ai tout de suite dit « Waooh, c’est qui ça ». Parce que je ne le connaissais pas, j’entendais juste parler parce qu’il avait fait le Championnat d’Europe de moins de 18 ans je crois et il a terminé meilleur joueur alors qu’il avait 16 ans ou 17 ans je pense.
«Hazard ? J’ai tout de suite dit :Waooh, c’est qui ça»
Une chose est sûre, je savais qu’il n’avait pas l’âge de cette catégorie et il a réussi à être le meilleur joueur. A partir de ce moment, j’ai compris qu’on avait vraiment à Lille un très gros talent. Tout ce qui lui arrive aujourd’hui, il l’a déjà prédit. Il a beaucoup confiance en lui, il a toujours rêvé du Real Madrid. Malheureusement pour lui et pour nous qui l’aimons, il n’a pas encore donné le potentiel qu’on lui connaît à cause des bessures. J’espère que cette saison sera la meilleure et on pourra voir tous Eden qu’on aime. C’est quelqu’un de vraiment tranquille, de gentil, de sympa qui ne se prend pas pour une star. Il est vraiment simple, il rigole avec tout le monde. Et Il continue d’appeler ses ex coéquipiers. D’ailleurs, on s’est retrouvé en mai en France « la Cuvée 2011 ». Eden n’a pas pu être là parce qu’il y avait la finale de la Ligue des Champions. Mais, il nous a appelés par video call et on lui a passé le coucou. C’est pour vous dire vraiment la simplicité du jeune homme.
On ne va pas le cacher, vous fûtes un grand défenseur. Et vous avez connu 9 clubs en carrière. Quel est votre meilleur et pire souvenir ?
Mon meilleur souvenir en carrière, c’est quand on a gagné la Coupe de France et que j’ai levé la tête et j’ai vu le drapeau camerounais. Je me suis dirigé vers ce drapeau et j’ai vu que c’était ma maman. Parce qu’elle est arrivée le jour du match et c’était ma compagne de l’époque qui est allé la chercher à l’aéroport. J’étais à la mise au vert et je n’ai pas pu aller à l’aéroport. Jusqu’à la veille de la finale, je ne savais pas qu’elle allait venir. C’est sa première fois en Europe et c’est moi qui avais fait toutes les démarches. Elle venait se faire soigner. Ça m’a vraiment fait plaisir parce qu’elle ne voulait pas que je joue au football et la première fois qu’elle met le pied sur le sol français, je gagne mon premier titre. C’était vraiment un moment émouvant.
Et le pire ?
«Je méritais d’être dans la liste pour la CAN 2017»
Le pire souvenir de ma carrière, j’en ai deux. Quand je me suis blessé avec Basakséhir au bout d’une semaine quand j’ai signé pour ce club qui m’a vraiment bien traité. On était en Autriche, j’ai taclé et j’ai eu une grave blessure, une fracture du péroné et on m’a placé la barre de fer. Jusqu’à aujourd’hui, je vis encore avec des vis. C’est un mauvais souvenir pour moi. Et puis aussi, la non convocation en Coupe d’Afrique des Nations 2017 où le Cameroun a gagné. Parce que je méritais d’être dans cette liste. Malheureusement, je ne suis pas allé. Ils ont gagné, tant mieux pour eux et j’étais content pour mon pays et ceux qui sont allés. Ça reste toujours en travers de la gorge.
On reste avec les Lions Indomptables. Malgré vos 49 sélections, vous n’avez gagné aucun trophée en équipe nationale. Êtes-vous satisfaits de votre parcours dans la tanière ?
Je suis un quasi perfectionniste. Je n’ai pas gagné de titres avec les Lions Indomptables. Je n’ai pas un souci parce que c’était écrit. C’est Dieu qui a voulu que ce soit comme ça. C’est un regret c’est sûr. J’aurais aimé gagner quelques choses pour mon pays. Mais, à côté de cela, j’ai donné le meilleur de moi-même, j’ai donné tout ce qu’il y avait à donner pour ce maillot qui pèse énormément. J’espère que je n’en ai pas déçu beaucoup. Mais, ça me fait quand-même un pincement au cœur quand je vois que je n’ai pas gagné la Coupe d’Afrique des Nations. Mais bon ! C’était écrit, c’est comme ça. Je suis croyant, je pense que Dieu l’avait écrit et on n’y pu rien.
Aurelien Chedjou rêve-t-il d’un poste au sein du staff technique des Lions Indomptables dans les années à venir ?
Rêver, c’est trop dire. Aujourd’hui, je suis concentré sur mon diplôme. Aujourd’hui, je ne suis pas à même de postuler pour un poste ou que ce soit. Je veux avoir mon diplôme avec le MIP et après on verra ce qui se propose à moi. Si la nation m’appelle et si j’ai les compétences pourquoi pas. Mais, pour le moment, je n’y pense pas. Je pense tout juste à faire mon diplôme. Je pense juste à être concentré à mener à bien ma boite CSC (Chedjou Sports Consulting) puis à aider les jeunes au Cameroun qui ont besoin de moi. C’est ce qui me prend le temps en ce moment. Pour le reste, je pense que la sélection est entre de bonnes mains avec Rigobert (ndlr, Song) avec tous ceux qui sont là en ce moment, Benoît Wambai qui vient d’arriver, Patrick Mboma, donc il n’y a pas de soucis.
On se rappelle que vous aviez mis un petit pont à Zlatan Ibrahimovic et après, une discussion sympa avec Eden Hazard était virale sur la toile. Alors dites-nous, l’attaquant qui vous a le plus causé de problèmes.
Je vais sous surprendre mais l’attaquant qui m’a le plus posé de problèmes, c’est Steve Savidan. Vous vous souvenez de cet attaquant qui était à Caen, à Valenciennes et quand il a signé à Monaco, on lui a décelé une anomalie cardiaque. C’est celui-là qui m’a le plus posé de problèmes parce qu’il bougeait tout le temps, il avait un centre de gravité très bas. C’était vraiment, excusez du mot, une peste. C’était vraiment difficile d’être au contact de cet attaquant-là. Il n’était pas vraiment connu mais c’est quelqu’un qui faisait vraiment du tort aux défenseurs. Il était très très fort.
Avec quelle star du foot auriez-vous adoré jouer ?
J’aurais aimé jouer avec Zidane parce qu’il a toujours été mon idole depuis tout petit dans mon quartier. C’était le joueur que j’aimais le plus, j’idolâtrais le plus. Même si les époques sont différentes, j’aurais aimé avoir quelques minutes avec lui. Pour la petite anecdote, quand Galatasaray jouait contre le Real Madrid, à la fin du match, il s’est mis du côté où Galatasaray sortait et à saluer joueur par joueur. Quand il m’a serré la main, je vous avoue que je ne voulais plus me laver (Rires). C’était vraiment comme un cadeau du ciel. Quand un enfant a son cadeau de Noel, pour moi c’était vraiment énorme. C’est lui que j’avais toujours idolâtré, j’avais son poster dans ma chambre chez ma maman. Il m’a serré la main et c’était un moment inoubliable.
On sait que Kylian Mbappé est originaire du Cameroun, votre pays. Pensez-vous qu’il peut toujours faire une carrière monstrueuse comme Ronaldo et Messi bien qu’il ait refusé le Real Madrid ?
Oui bien sûr. La qualité du joueur ne change pas quel que soit l’équipe dans laquelle il joue, ça c’est clair. Vous parlez du PSG comme si c’est AS Bamendjou, l’équipe de mon village (Rires). Non, le PSG c’est une grande équipe aujourd’hui qui a beaucoup de choses à dire en Ligue des Champions et même en championnat de France. Maintenant, il y a des choses qu’il faut rectifier pour s’asseoir à la même table que le Real Madrid, Barcelone, Manchester j’en passe. Le fait de rester au PSG n’enlève en rien de la qualité et la détermination du gamin.
Pour avoir joué avec son frère Jirès Kembo, j’en parle souvent, le petit est vraiment ambitieux. Ce qu’il dit et fait, ça me rappelle Ronaldo dans ses débuts. Je pense qu’on est parti pour au moins 5, 6 voire 8 ans de rivalités entre Haaland et lui. Il est parti pour faire une très grande carrière. Je n’ai pas de doutes dessus. S’il ne se blesse pas, s’il continue à être exigeant envers lui-même comme je le sais, s’il continue à être exigeant comme ça, s’il continue à être celui-là qui veut toujours plus, oui, il gagnera beaucoup de Ballons d’Or et beaucoup de trophées.
Maintenant, pour qu’il fasse une carrière comme Cristiano Ronaldo et Messi, pourquoi pas. Les records sont faits pour être battus. Donc, qui aurait cru il y a quelques années qu’on ne parlerait que de ces deux-là ! Chaque année, ça va changer. Aujourd’hui on parle de Kylian Mbappé. Dans 15 ans, on parlera de quelqu’un d’autre. Pour moi, on est bien parti pour qu’il efface tous ces records. Il a déjà une Coupe du Monde, imaginez-vous à 24 ans. Pour ma part, même le fait d’être resté au PSG, ce n’est pas un souci. C’est son ambition qu’il mettra le curseur là où il veut que le curseur soit.
Lionel Messi ou Cristiano Ronaldo, que dites-vous ?
«Je paierai 100 millions pour voir Messi jouer»
Moi, je suis un partisan de Messi, à fond, à fond, à fond. Je dirai Messi parce que c’est un mec que vous réveillez à 3h du matin et il va vous faire de la magie. Je suis parti sur Messi en plus je suis Catalan, je suis un fervent supporter de Messi depuis les débuts. Il me fait beaucoup rêver. Pas que Ronaldo ne soit pas fort. Mais, vous m’avez posé la question et je vous dis que je paierai 100 millions pour voir Messi jouer. Oui, je le ferai. Même s’il a fait une mauvaise saison au PSG il faut le dire, c’est un mec quand il touche le ballon il y a tout de suite quelques chose qui se réveille en vous le fan du football. Je suis plus petit pont, crochet, le tiki taka, beaucoup plus les enroulés. Voilà, je suis plus ça que les grosses frappes, les courses vitesses en grande intensité de Ronaldo par exemple. Moi, je suis plus Messi.
Votre mot de fin.
Merci de l’invitation. Merci pour tous ce que vous faites pour les lecteurs qui ont besoin d’informations de ceux-là qui les font rêver devant leur petit écran. Merci à vous pour votre partage et pour votre professionnalisme. Quand vous voulez, que ce soit pendant le Mondial pour disséquer les performances de nos nations qui nous représentent là-bas, il n’y a pas de soucis, on est ensemble et à bientôt. Un bonjour à mon frère Shéyi Adebayor mon gars.
Propos recueillis: John Attisso
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