En remportant la CAN-2024, la Côte d’Ivoire a non seulement triomphé sur le plan sportif, mais a aussi renforcé son « soft power ». En organisant la Coupe d’Afrique des Nations, qualifiée de « plus belle de l’Histoire », le pays entend prolonger son succès. Ses six stades conformes aux normes de la CAF renforcent son influence continentale à travers le sport.
« La Côte d’Ivoire a su transformer sa CAN en véritable vitrine. Ce genre d’événement est rare, et il a généré d’excellentes retombées en termes d’image, avec des figures comme Magic System et des moments mémorables comme le ‘Coup du marteau’ », affirme Hervé Kouamouo, chercheur en sociologie politique du sport et consultant pour France 24. « Le pays a su en faire un événement national, en mobilisant ses leaders culturels et sportifs. »
Un an après cette période de grandes émotions footballistiques, la Côte d’Ivoire continue de capitaliser sur son succès. Après avoir investi 1,3 milliard d’euros dans l’organisation de la CAN, soit 7 % de son budget national, le président Alassane Ouattara a bien des raisons de continuer sur cette voie.
Les stades modernes, construits ou rénovés pour l’événement, jouent un rôle central dans cette stratégie. Tandis qu’une vingtaine de sélections africaines ne disposent plus d’infrastructures homologuées pour les compétitions internationales, la Côte d’Ivoire dispose désormais de six stades de qualité. Bouaké, San Pedro, Yamoussoukro, Korhogo et les deux stades d’Abidjan ont ainsi accueilli des équipes telles que la Guinée, le Bénin, le Burundi, le Tchad, l’Éthiopie, les Comores ou encore le Burkina Faso lors des éliminatoires pour la CAN-2025.
« La Côte d’Ivoire a fait un grand pas », souligne Hervé Kouamouo, rappelant qu’entre 2021 et 2022, le pays avait passé plusieurs mois sans stades homologués. « Aujourd’hui, elle devient une alternative sérieuse au Maroc et à l’Afrique du Sud pour les matches délocalisés. »
La Côte d’Ivoire se positionne ainsi comme une puissance sportive en Afrique, selon Yvan Issekin, docteur au Centre de recherche sur le sport en Afrique. « Avec la chute d’Issa Hayatou à la tête de la CAF, une coalition de pays, dont l’Afrique du Sud, l’Égypte, le Maroc et la RDC, a pris le contrôle du football africain. La Côte d’Ivoire peut émerger comme un acteur clé de cette nouvelle géopolitique », analyse-t-il. À l’instar d’autres grandes nations africaines, la Côte d’Ivoire mise sur le « soft power » par le sport. Le Maroc et le Rwanda en sont les exemples les plus marquants, avec des stratégies réussies pour utiliser le sport comme vitrine internationale.
En 2025, la Côte d’Ivoire ne se contentera pas de briller dans le football. Elle accueillera également le championnat d’Afrique féminin de basketball et les championnats d’Afrique de judo. Le pays va même au-delà des événements continentaux : Abidjan a proposé d’organiser l’édition 2024 du Trophée des champions français entre le PSG et Monaco, bien que le Qatar ait finalement remporté l’organisation. Cette proposition témoigne de l’ambition des autorités ivoiriennes.
« La Côte d’Ivoire a mis en place un modèle de gestion efficace, avec un partenariat entre l’Office national des sports et une agence chargée de gérer les infrastructures sportives, les ouvrant ainsi à une diversité d’événements, qu’ils soient sportifs ou culturels », souligne Yvan Issekin.
Ce succès ivoirien est d’autant plus remarquable que d’autres pays hôtes de la CAN ont souvent vu leurs stades laissés à l’abandon après l’événement. « Le véritable défi réside dans ce qui reste après une CAN. Au Gabon, les stades ont été utilisés jusqu’en 2017 avant de tomber en désuétude. Deux ans après la CAN au Cameroun, on peine à se souvenir de l’événement. En Côte d’Ivoire, il y a eu un véritable travail de fond », conclut Hervé Kouamouo.
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